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Aux Pays-Bas, quasi tous les UMC disposent d'une (très) large collection d'art et rémunèrent un conservateur/curateur diplômé. L'UMC de Leyde (LUMC) est l'un des plus actifs sur le plan artistique. Situé en plein centre, à l'arrière de la gare, il est très bien intégré dans la vie culturelle urbaine.Il possède quelque 2.600 oeuvres, dont certaines signées par de grands noms comme Karel Appel, Bram Bogart, Corneille, Armando, Lucebert, Jan Cremer, Henk Visch, Barbara Hepworth, Sebastiao Salgado, Erwin Olaf, William Klein, Marlene Dumas, Marc Mulders, Michel Seuphor, Roger Raveel, Narcisse Tordoir, Johan Creten, Carl De Keyzer. Elles représentent une collection internationale de niveau muséal, composée de peintures, de sculptures, de tableaux et de photographies. Elle offre une vision originale de la période artistique allant du mouvement CoBrA à nos jours. La plupart des 2.600 oeuvres sont exposées dans les trois bâtiments du LUMC : l'hôpital, l'université et le centre de recherches. Les autres sont conservées au sein de deux petites réserves situées dans les dépôts du bâtiment hospitalier.L'hôpital est particulièrement fier de la sculpture intitulée Le Grand Vivisecteur que l'on doit au Belge Johan Creten, représentant une chouette en bronze. Il n'en existe que trois exemplaires (dont un à Malines, à côté de la Tour Saint-Rombaut). La sage chouette surveille en quelque sorte l'entrée de l'hôpital.Ce qui différencie le LUMC des autres UMC, c'est la longue liste d'activités culturelles qui y sont organisées et qui font le lien entre l'hôpital et le tissu urbain. " Chaque année, nous organisons cinq expositions temporaires thématiques. Elles ont lieu dans notre galerie ouverte située au rez-de-chaussée, à côté de la réception de l'hôpital", explique le Dr Sandrine van Noort, historienne et historienne de l'art, responsable des collections depuis 12ans." Nous organisons toujours un vernissage auquel sont conviées des personnes internes et externes à l'hôpital, y compris les patients. On enregistre un grand nombre de visiteurs pendant la durée de l'exposition, souvent des patients et leurs visiteurs, mais aussi des 'médecins' et le personnel soignant. Oh non, en milieu hospitalier, l'art ne doit pas obligatoirement être sans engagement. Nous osons vraiment explorer les limites. Une bonne oeuvre d'art présente plusieurs strates de significations et elle invite le spectateur à réfléchir. Nous proposons donc aux visiteurs de noter leurs réflexions dans un carnet de bord et nous conservons toutes ces citations. Ces notes témoignent d'une forte implication de la part des visiteurs et de leur appréciation d'une oeuvre. Ils voient dans celle-ci un signe de réconfort ou un moment de distraction. L'art est quelque chose d'universel, de durable, transcendant tout, une sorte de phare. Grâce à l'art, nous brisons l'environnement stérile de l'hôpital. La présence d'un art de qualité est, pour le LUMC, une carte de visite traduisant la qualité des soins!" S'enthousiasme Sandrine van Noort.La collection du LUMC existe depuis 30ans. À l'occasion de cet anniversaire, un livre d'art a été publié au mois de juin sous le titre Kunst laat het LUMC zien. 30 jaar kunst in het Leids Universitair Medisch Centrum. (L'art se laisse voir au LUMC. 30ans d'art au Centre médical universitaire de Leyde). " La galerie a été ouverte dans les années 80", raconte l'historienne. " À l'époque, le régime des 1% existait encore : les hôpitaux devaient consacrer 1% de leurs frais de construction à l'art. Cette obligation a depuis été supprimée aux Pays-Bas, mais cela n'a pas empêché les UMC et de nombreux centres médicaux académiques (AMC) de continuer (à l'appliquer) et d'enrichir leur collection. Nous rencontrons d'ailleurs régulièrement les curateurs des UMC pour partager nos expériences et parfois, à l'issue de ces consultations, naissent des initiatives communes et/ou des échanges. Nous faisons tous partie de l'Association des collections d'entreprise.""Une commission des arts existe au sein de l'hôpital. Des chefs de service y siègent ainsi que des médecins, des infirmières, mais également des personnes extérieures à l'hôpital, l'ancien directeur du Musée De Lakenhal par exemple, ou encore un étudiant qui apporte des idées neuves. Des initiatives émergent, comme la création d'un parcours de sculptures tout autour de l'hôpital, des nouveaux projets tels que l'interprétation artistique des salles d'attente que nous avons déjà commencée avec le service de diabétologie. Le service de cardiologie suivra à l'automne prochain. Parfois, nous développons aussi des projets communs avec les musées de la ville comme ce fut le cas en 2017 autour du mouvement artistique De Stijl. Tous les dimanches, nous organisons par ailleurs des concerts de musique classique auxquels les patients qui le souhaitent peuvent assister, parfois même au lit. Ceux qui doivent restés alités peuvent suivre le concert à la télévision depuis leur chambre."Tout cela doit quand même coûter une certaine somme d'argent? " Cela va peut-être vous surprendre, mais mon budget annuel destiné aux achats et aux expositions - sans compter les frais de personnel - s'élève à moins de 100.000 dollars (environ 100.000 euros, ndlr). Le parcours des sculptures reçoit un financement à part, les salles d'attente sont payées par les différents services médicaux, et pour les grandes expositions ou les grandes installations, nous faisons appel à des fonds, comme le Fonds Mondriaan."Pour donner force à ces arguments, nous citerons le Dr Jaap Fogteloo, président de la commission des arts du LUMC, dans l'avant-propos de l'ouvrage Kunst laat het LUMC zien : " Une étude longitudinale, portant sur des espaces dépourvus d'art montrés aux patients et ensuite présentant des oeuvres d'art, a montré que la présence de l'art avait une influence positive sur la satisfaction de patients "1. Dans cette optique, l'argent qu'injecte un hôpital dans des missions artistiques est particulièrement bien investi.