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" En dix-sept ans aux urgences, je pensais avoir tout vu... mais c'était compter sans le coronavirus ", résume le Dr Elke Van Renterghem. C'est là qu'intervient sa passion pour la photographie. " J'ai toujours eu l'habitude de saisir les moments qui me semblaient uniques - le plus souvent à la va-vite, avec mon smartphone, et sans forcément en faire grand-chose. Quand je suis en vacances, par contre, je prends davantage le temps. Nous choisissons toujours de partir à l'aventure en-dehors des sentiers battus dans des régions particulièrement photogéniques. J'adore aussi faire de la photo sous-marine. "Dans l'activité frénétique des premières semaines de la pandémie, l'urgentiste ne sait plus où donner de la tête. Elle décide de traîner tous les jours avec elle son appareil photo - " je vais au travail à vélo " - et de documenter l'agitation, le dévouement, les mesures de protection, mais aussi l'angoisse et l'épuisement ambiants. " À un moment donné, j'ai réalisé que presque tous les patients Covid de l'établissement étaient passés par les urgences. C'était assez... particulier. "Ses collègues aussi en avaient bien conscience, et c'est sans doute en partie pour cela qu'ils ont volontiers accepté de participer à son reportage. " Habituellement, je ne photographie pas beaucoup les gens. Aller vers un inconnu pour lui demander si je peux tirer son portrait, très peu pour moi ! " Mais dans ce cas spécifique, s'agissant de personnes avec qui l'urgentiste travaillait de longue date et entretenait un lien de confiance, les photos sont venues d'elles-mêmes. Rares sont d'ailleurs celles dont le sujet a vraiment pris la pose. Elles sont un hommage à ses collègues soignants, mais aussi au personnel administratif, logistique ou d'entretien. Les patients, eux, y sont peu présents. " J'ai toujours soigneusement gardé mes distances. "Le Dr Van Renterghem a sélectionné parmi ses photos une série qui a été présentée à l'AZ Sint-Lucas. " C'est la première fois que je montre ainsi mon travail ", explique-t-elle avec modestie. " Les images en noir et blanc ont quelque chose d'un peu menaçant, mais elles reflètent aussi la sérénité et la tristesse qui régnaient par moments. "Bientôt un reportage post-coronavirus ? " Les urgences sont certainement un sujet captivant, car il s'y passe toujours quelque chose... mais les autres seront peut-être moins ouverts à mon objectif lorsque cette période exceptionnelle sera passée. "L'hôpital Imelda de Bonheiden a également exposé une série de portraits, réalisés cette fois par la photographe professionnelle Hilde Collier. Installée dans l'entité voisine de Hombeek, elle a pris elle-même l'initiative de réaliser ce reportage qu'elle a offert à l'hôpital ; des collages composés de ses photos sont aujourd'hui exposés dans plusieurs services. Après plus d'un mois de confinement, Hilde Collier était impatiente de se remettre au travail. Désireuse de contribuer aux nombreuses actions de soutien au personnel de soins, elle a demandé la permission à l'établissement de réaliser une série de portraits des personnes impliquées dans la prise en charge des patients Covid-19 - une séance photo exceptionnelle où 93 médecins et autres collaborateurs issus de divers départements ont pris la pose avec ou sans leur masque. " J'avais envie de braquer les projecteurs sur les soignants, en reconnaissance de leur travail acharné dans ces circonstances particulièrement difficiles. Pouvoir malgré tout saisir tant de sourires (fût-ce derrière un masque), lire l'énergie et l'enthousiasme dans les regards derrière les lunettes ou les écrans en plexiglas, cela a été pour moi une expérience formidable. "En définitive, la photographe a immortalisé 93 hommes et femmes. " Le collage symbolise tous les collègues qui, sur le devant de la scène ou en coulisses, apportent leur pierre aux bons soins dont nos patients bénéficient même dans le contexte de l'épidémie... en gardant toujours la tête froide et le coeur sur la main ", souligne le directeur médical Philippe Rijkers. " C'était sympa de participer au reportage ", témoigne Cindy Van Vlasselaer, infirmière-chef de l'un des départements covid-19. " Nous n'aimons pas tellement nous retrouver sous le feu des projecteurs, mais c'est un bel hommage et un souvenir de cette période hors du commun. Néanmoins, la plus belle marque de respect serait pour nous que tout le monde se tienne aux directives pour nous éviter le plus possible de devoir prendre en charge d'autres patients covid-19. "