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L'année 2020 a consacré à la fois l'essor du commerce en ligne et l'importance vitale de bonnes infrastructures de soins de santé dans nos sociétés. Il est un domaine qui touche à ces deux sujets: la télémédecine. L'Organisation mondiale de la santé (OMS) estime sa part à un tiers environ du total des consultations en 2020, avec l'Asie du Sud-Est (50%) et l'Europe (un peu moins de 40%) en tête. Elle ne constitue toutefois qu'une part minime de l'ensemble des technologies de la santé, un marché qui aurait dépassé la barre des 200 milliards de dollars l'an dernier. Les visites médicales en ligne ont récemment explosé, observe Rich Wolf, gestionnaire de portefeuille chez Capital Group (dont le fonds New Perspective aborde entre autres cette thématique) et spécialiste des entreprises américaines axées sur la technologie médicale. "Ce service était disponible depuis un certain temps, mais son usage restait modeste avant la crise du Covid-19. Celle-ci a transformé la vague en tsunami", observe-t-il. "Nous n'en sommes encore qu'aux premiers stades de la mise au point d'appareils rentables qui peuvent envoyer aux médecins toute une série de mesures liées à la santé ou aider le patient à gérer ses propres soins. Il y a une grande opportunité pour les entreprises de répondre à ce besoin allant de la connectivité à la gestion des données." Il évoque les systèmes de mesure du glucose et pompes à insuline pour les diabétiques, les moniteurs portables traquant les irrégularités cardiaques et autres technologies permettant aux médecins de suivre les patients à distance. "Il n'y a jamais eu de période plus excitante dans le domaine des soins de santé, en tout cas depuis la fin des années 90", conclut avec enthousiasme le gestionnaire, en précisant que le seul marché de la télémédecine devrait passer de 46 à 176 milliards de dollars entre 2019 et 2026. Pas étonnant que ce thème fasse l'objet d'un congrès annuel: le Digital Health World Congress qui se tiendra (virtuellement) les 30 et 31 mars prochains. "L'investissement dans le secteur des soins de santé dépasse le cadre des entreprises pharmaceutiques ou de biotechnologie", précise de son côté John Bowler, gestionnaire de fonds chez Schroders. Cette maison britannique propose le fonds spécialisé Healthcare Innovation, lancé en été 2019 et qui a progressé de 45% en 2020! "La pandémie nous force à réfléchir à l'organisation d'autres pans du secteur des soins. La médecine à distance et la communication virtuelle ont prouvé leur intérêt. La première existait déjà avant la crise du Covid-19, mais elle a maintenant réellement démontré son utilité." La télésanté, ce n'est pas seulement permettre une consultation numérique avec son médecin généraliste, précise-t-il: "L'intelligence artificielle peut aussi apporter une aide précieuse au niveau de la sélection des médicaments."Les technologies centrées sur le domaine médical sont promises à un grand avenir pour diverses autres raisons, explique John Bowler. Parmi elles: le besoin d'efficacité. "Les soins de santé absorbent une part croissante des budgets publics. Or, aux Etats-Unis, on considère que 30 à 40% de ces budgets sont une forme de gaspillage. Il y n'y a dès lors d'autre choix que d'opérer des changements et d'améliorer l'efficacité."L'efficacité est également mise en avant dans la note stratégique que la banque Edmond de Rothschild a consacrée le mois dernier au secteur de la médecine. Y compris sur le plan de la télémédecine. Son usage aurait quadruplé l'an dernier aux États-Unis, suite bien sûr à la pandémie de Covid-19. En Chine, la société spécialisée Ping An Good Doctor a enregistré plus d'un milliard de consultations à distance en 2020. Boosté par la crise sanitaire, l'essor de la télémédecine s'appuie sur plusieurs éléments, relève l'étude: "La généralisation des tablettes et smartphones, bien sûr, mais aussi les progrès de l'intelligence artificielle (IA), puisque des algorithmes sont capables d'égaler des médecins dans la lecture d'images." Pour le citoyen lambda, la télémédecine va changer le concept de sa consommation médicale, affirme la banque. Aux Etats-Unis, où les soins sont réputés chers, une enquête menée auprès de patients utilisant la médecine à distance relève que ces derniers estiment avoir économisé en moyenne 900 dollars sur un an. De leur côté, les hôpitaux ont vu le coût des consultations baisser de 11% par rapport à un rendez-vous physique. Et ceci sans tenir compte d'une durée de consultation diminuée d'un cinquième. Au total, la télémédecine permettrait un gain de productivité de l'ordre d'un tiers. Plus fondamentalement, les hôpitaux pourront abandonner à la télémédecine les soins moins urgents ou les visites de contrôle chronophages, pour se concentrer sur les cas nécessitant la présence du patient et les cas graves. C'est sur ces bases que la croissance annuelle de la télémédecine est attendue dans une fourchette de 20 à 25% dans les prochaines années.